Leçon venue du Mexique
Dans l'Etat de Guerrero, au Mexique, après une série de réunions et débats, les habitants ont pris une décision forte, celle de créer leur propre police. Désignés par l'assemblée de chaque village, ces policiers communautaires effectuent leur service pendant une période de trois ans. Ils ne sont pas rémunérés (mais on aide leur famille pour les travaux des champs), et demeurent sous le contrôle de la population, tenus d'exercer leurs fonctions d'une manière irréprochable. Dans le cas contraire, ils sont immédiatement révoqués.
Très rapidement opérationnelle, la Policía Comunitaria a commencé à effectuer des arrestations. Les bandits qu'elle interpellait étaient remis à la justice officielle. Mais le juge, arguant que cette police n'était pas légale, et que les preuves qu'elle fournissaient n'avaient pas de valeur, les remettait en liberté.
L'étape suivante fut donc la création, d'un système de justice autonome, destiné à parachever le travail des policiers communautaires. La justice passe, à leurs yeux, par une tentative de réparation des torts infligés, poursuivie par un effort de réconciliation avec les victimes et l'ensemble de la communauté. Les délinquants sont donc condamnés, en fonction de la gravité des préjudices portés et les circonstances qui les entourent, à travailler, pendant une durée pouvant aller de quelques semaines à plusieurs années, pour les villages appartenant à la Coordination Régionale des Autorités Communautaires (CRAC).
Convenablement nourris et traités, ils sont tenus de dormir en cellule, et de respecter jusqu'au bout les décisions prises à leur encontre. Vers la fin de leur peine, une délégation d'anciens vient leur prodiguer conseils et recommandations pour retrouver une vie digne au sein de leur village.
Cette police et le système de justice de la CRAC ont obtenu des résultats impressionnants, faisant pratiquement disparaître la délinquance dans toute la région. Les quelques communautés impliquées au début sont aujourd'hui plus de 80, et une soixantaine sont candidates à leur incorporation.
Cette histoire nous montre que l'on peut juger l'état d'un pays, au sens propre comme au figuré, à la manière dont sa police et sa justice se comportent.
Cette histoire nous montre aussi qu'une autre police est possible, elle est d'ailleurs beaucoup plus efficace parce qu'elle s'attaque à la racine d'un problème et évite qu'il ne se reproduise. Elle n'est pas une partie du problème mais une partie de la solution. Ce ne sont pas des institutions insensibles et sadiques, qui n'ont plus de crédibilité morale qui viennent rappeler à celui qui a commis un acte de délinquance que ce qu'il a fait est mal mais c'est le peuple et ses plus dignes représentants qui agissent pour le bien du peuple et non l'intéret de certains. La justice ne vise qu'à mieux instruire. Elle n'est pas dogmatique, elle est pragmatique. Celui qui commet un acte de délinquance n'est pas traité injustement, il ne voit pas deux poids deux mesures, il ne nourrit pas de ressentiments, il n'est pas traité de délinquant mais comme quelqu'un qui a la capacité de se réformer, quelqu'un qui peut apporter à la société parce que la société lui fait confiance et qu'elle est à son écoute.
Cette histoire nous montre surtout que l'Etat n'est pas la solution mais que la solution nous la portons en nous même. Nous sommes la solution.
Seul le peuple soutient et défend le peuple.